L’oreille écoute la librairie francophone (La première, dimanche 12-13), la main saisit Histoire de Bruna choisi avec justesse par une amie parmi ses coups de coeur récents.

Paru en poche au Murmure des soirs en 2014, cet ouvrage de Marc Pirlet prête plume à la fille d’un mineur sérésien déportée par la gestapo comme travailleuse forcée pendant la deuxième guerre mondiale. Elle atterrit d’abord en usine, puis passe par Ravensbrück et finit la guerre à Bergen-Belsen. Elle en réchappe: une volonté jeune & farouche doublée de rencontres opportunes finit par la ramener à Seraing.

Son vécu d’éloignements nous est restitué d’une plume économe de ses moyens. Le sujet est si percutant qu’elle en respecte la gravité profonde.
Un document littéraire, surtout pas un roman. L’auteur s’est mis au service d’une vie en lui taillant une robe littéraire seyante.

La main se fraie un chemin vers la table des matières, habitude prise de longue date. La lecture démarre en suivant son propre fil non chronologique, tel un papillon dans un champ de fleurs sauvages.

La démarche de conservation de la mémoire que l’auteur et l’éditeur ont réussi remarquable: la mémoire ouvrière se fixe ainsi, s’inscrit dans la durée longue, pérenne presque.

L'auteur a ainsi fait oeuvre utile d'écrivain public, prêtant sa plume à une parole dense. Il offre à Madame Bruna l'occasion de rejoindre le cercle très fermé de civils qui ont relaté les affres de leur vie pendant la deuxième guerre mondiale.

Ils ne sont pas si nombreux les récits de ces travailleurs et travailleuses forcé-e-s par la gestapo à contribuer contre leur gré à l'effort de guerre allemand.