A. Berque, Poétique de la terre, p. 82
Déclinaisons de l'éveil sur ce tableau, en partant de la colonne médiane

L’existence, la vie se tient au seuil de la chair vive, insérée dans la réalité. L’ici & maintenant s’apprivoise dans le paysage familier. La vie ronronne. Chair vive, toujours purifiable, déjà apurée, en voie, toujours en voie de la réalité; le corps s’émeut de chaque rencontre, que chacune soit possible.
Le seuil, entre ouverture et fermeture, est une belle image pour représenter l’essence fluide. Le seuil maintient le va-&-vient possible. Il le potentialise. Le corps se sait vibration. Elle se manifeste, entre discrétion et prégnance, à bords de mondes, comme le dit le très heureux titre du livre de M. Cornil.
Que le seuil soit au final étymologiquement contréeSolum repose sur une racine indoeuropéenne (laquelle, le robhis ne dit pas ?) indiquant un établissement humain, représentée par exemple en russe par « s’elo », village et le longobard « sala » maison, construction.
Que le seuil, au final étymologiquement contrée, dévoile cette subtilité qui constitue la plus sûre marque de fabrique (probable belgicisme) de la mésologie.
Contrée < lat. vulg. contrata, féminin, < contrata regio « pays situé en face (de celui qui regarde) ». le mot a vieilli en français & désigne une étendue de terrain, allant des parages à la région & au pays tout entier.
Parages: le mot désigne d’abord l’étendue de mer qui borde les côtes (pluriel 1643).
Se tenir dans les parages de l’éveil. Exister, c’est se tenir ni libéré ni attaché (3e lemme), c’est être éveillé. Dans l'instant, l'ici & mlaintenant.
La colonne du mitan de A. Berque semble toute faite de ni ni. Le ni ni est un autrement (comment), un ailleurs (où), un différent (essence, qui, quoi).
L’éveil n’est pas un état. Il est mouvement de va-&-vient entre le discret et le souverain, le secret & l’intense.
Entre le secret et le patent.
L’éveil est cette vibration de chair vive qui existe ni libérée, ni attachée, ancrée & navigante, implantée & mobile.
L’humain est cet entre-deux qui génère le ni ni. L’humain existe dans ce mouvement entre ni et ni comme chair vive, ni esprit animant, ni matière morte.
L’humain existe par ce mouvement constant, ce va-&-vient entre le pur et l’impur, toujours purifiable, jamais absolutisé dans l’un des deux extrêmes. (A - affirmation / non-A - négation).
Purifiable. Et c’est parce que l’humain est purifiable que chaque moment est unique. Le chemin pris, le chemin emprunté - il faudra le rendre après s'y être rendu ! - le chemin emprunté dans l’ici & maintenant par chaque moment est unique, multipolaire, fluctuant entre le discret et l’intense, entre couvaison et flamme, ni flamme ni cendre froide.
Chaque moment vivifie le mouvement. Chaque moment avive le réel perçu dans l’émotion née de la rencontre toujours recommencée, jamais pareille.
Chaque moment maintient le corps ici, ni haut ni bas, dans l’entre-deux, dans un flotté purifiable de chairs vives et pourtant à la fois pur et impur (4e lemme, le syllemme).


Ce texte a pour contraintes d'employer les mots de la colonne médiane; cette exigence libère la plume de façon souvent productive. L'OULIPO 'OUvroir de LIttérature POtentielle en a fait sa raison-d'être et a dressé un impressionnant abécédaire. Me relisant le lendemain de la mise en ligne, je constate aussi que j'ai revisité le tétralemme sur des cas pratiques. Effet induit: l'appropriation d'un instrument de la logique selon A. Berque...


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Aphorisme, comme ça...

« La retraite est une chose merveilleuse,
qui libère de terribles puissances.
& elle donne au silence de grandes douceurs. »
Gilles Deleuze, dans une lettre adressée à Arnaud Villani,
publiée dans L'abeille & l'orchidée, p. 149.

 

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