Un beau précipice léché par les flammes  
qui nous embrasent d’amour en son miroir  
au jardin paresseux, portrait de l’âme,  
qui cristallise nos soupirs, brise du soir.

Un grand étonnement nous fait asseoir  
ci-bas au milieu des statues de marbre,  
par où passe toute la volupté des arbres  
en leur terrien ancrage face à la ligne bleue,  
si régulière qu’elle se joue finement d’eux.

Nos souffles clairs se mêlent à en perdre haleine,  
à grands expirs chauds dans le froid  
où se déplient les frimas de la plaine,  
en des brumes océanes qui rouillent les croix.

Nos étoiles apprennent à bien vivre  
sous l’acier des eaux figées de givre  
au travers de nos pas lents et glacés,  
si clairs, dans ces hautes sphères pulvérisés
vers l’infini qui les font se neiger :
c’est de nos énergies l’immobilité.

Mais c’est aussi de nos chakras hantés  
en ces chemins escarpés des hautes terres  
qui les mènent vers l’épure sans misère  
d’une bonne union qu’inaugure notre éternité.

Caviardage en gardant le deuxième mot et la rime d'Émile Verhaeren : Les heures claires (extrait).
http://www.inlibroveritas.net/lire/oeuvre11055.html#page_20

Le beau jardin fleuri de flammes
Qui nous semblait le double ou le miroir,
Du jardin clair que nous portions dans l'âme,
Se cristallise en gel et or, ce soir.

Un grand silence blanc est descendu s'asseoir

Là-bas, aux horizons de marbre,
Vers où s'en vont, par défilés, les arbres
Avec leur ombre immense et bleue
Et régulière, à côté d'eux.

Aucun souffle de vent, aucune haleine.

Les grands voiles du froid,
Se déplient seuls, de plaine en plaine,
Sur des marais d'argent ou des routes en croix.

Les étoiles paraissent vivre.

Comme l'acier, brille le givre,
A travers l'air translucide et glacé.
De clairs métaux pulvérisés
A l'infini, semblent neiger
De la pâleur d'une lune de cuivre.
Tout est scintillement dans l'immobilité.

Et c'est l'heure divine, où l'esprit est hanté

Par ces mille regards que projette sur terre,
Vers les hasards de l'humaine misère,
La bonne et pure et inchangeable éternité.