Une partie de leur esprit
que leur pensée n'exploitait pas
savait que je vivais chez eux.

Jacques Abeille, Les barbares, 269.


Plan

Citation: l'insu
L'autorisé/Le possible
L'étiquette
L'agir corporel (ajout 20 05 20)
Les trois genres de connaissance
Science intuitive
Écarter les infox
L'intuition que la nature est une
Renvois
Droit de suite: (ajouts 17 & 20 05 20)

Nudité/Zones insues
Les Mains de l'accès
L'éveil, progression
Spirale découvrant l'immense
L'insaisissable insu: l'UNI & l'ISÉ (new 23 05 20)
Mudra

Accroissement autonome


 

Citation: l'insu
« L'insu est une ressource essentielle de notre déploiement.

L'insu est ce qui pense en nous sans passer par

  • le raisonnement,
  • la formulation
  • ou la volonté.

L'insu nous permet d'accéder

  • à une réflexion
  • & à une action

qui donnent droit

  • à l'intuition,
  • à la découverte fortuite,
  • aux rapprochements incongrus,
  • au contrôle sans conscience, que permet une longue expérience. » Élisa Brune & Paul Qwest, Nos vies comme événement, Odile Jacob, 2019, 41

Il semble que ce contrôle sans conscience soit voisin de l'intégration réussie d'un geste.


L'autorisé/Le possible
Dans cette phrase si bien charpentée apparait également, à côté de l'insu, cette autorisation d'accès (« permet d'accéder »), mais aussi cet accès rendu possible, grâce à l'insu précisément, à des pans de notre conscience qui seraient sans eux largement inexploités. L'intuitif, le fortuit, l'incongru donnent en quelque sorte accès à ce contrôle sans conscience qui nous fait se retourner sur ce qui a été réfléchi & agi par le corps de façon insue. Cette notion d'insu confirme l'inutilité, ce qui l'était déjà sans cela, de l'inconscient des psychanalystes.


L'étiquette
L'insu pourvoie d'une étiquette cette partie de l'esprit que la pensée n'exploite pas. Jacques Abeille nomme en complétude l'interface expressive entre la raison et l'intuition qui sont les deuxième & troisième genres de connaissances, selon Bento Spinoza. La raison appartient à cette partie de l'esprit que la pensée exploite alors que l'intuition ressortit, elle, de l'insu. L'imagination, premier genre de connaissance, est ainsi définitivement mise hors jeu.


L'agir corporel
Chaque corps incorpore de larges parts insues de la vie qui se déploie pourtant en lui. La pensée consciente ne les exploite pas. Le corps, oui. Est-ce penser que l'insu déploie en nous ? En tout cas, l'insu peut agir en faveur du déploiement de la vie en soi. Pour agir de façon adéquate, il semble important que l'insu puisse se déployer en étant le moins possible entravé en soi. Des balises de nature morales et/ou éthiques demeurent palpables à tout moment et peuvent varier dans le temps pour un même corps et bien sûr d'un corps à l'autre, même si ces valeurs de nature universelle qui nous balisent moralement et/ou éthiquement sont/devraient être largement partagées...

Cette façon adéquate d'agir permettrait de conserver au déploiement intérieur une tonalité qui demeurerait à tout instant en adéquation avec la pulsation vitale intérieure. Ainsi régi, le corps pourrait alors peut-être accéder

  • à l'intuitif,
  • au fortuit,
  • à l'incongru,
  • au hors-conscience,

qui sont autant de façons créatives, parmi d'autres probables, de baliser adéquatement l'agir corporel.

La pensée formaliserait, peut-être même à postériori, la décision que l'action entreprise prend pour seconder le corps à persister dans son être de la manière la plus aboutie possible, en fonction de ses capacités propres à ce moment-là.

Ce paragraphe, l'agir corporel, est entièrement dévolu à l'interface entre le 2e genre de connaissance spinozien, le rationnel, & l'intuition qui constitue pour Spinoza le troisième genre de connaissance. Cette voie d'accès par l'agir corporel, cette interface, pourrait être la plus sûre en cela qu'elle convoquerait l'attirail le plus abouti du potentiel que peut déployer un corps.


Les trois genres de connaissance
J'inclus ci-dessous l'essai mis à jour consacré aux trois genres de connaissance selon Spinoza; il avait été mis en ligne en juillet 2016, avant que ne se rencontrent les deux citations qui précèdent, celle de J. Abeille & celle d'É. Brune et P. Qwest.

   Typologie des trois genres de connaissance: in L'être et la joie 113, par R. Misrahi, complété par l'interface.
 1er genre  Par ouï-dire  Connaissance empirique sans fondement.
 Elle ressortit de la confusion des sens.
 Elle est passive et répétitive;
 elle est source de toutes les désillusions.
 2genre  Rationnel &
démonstratif

 (comme les maths)
 La connaissance de 2e genre procède par l’enchainement déductif &  emploie des notions communes.
 Elle définit la science intuitive.
 Le savoir ici est certes fondé, nécessaire & universel mais uniquement conceptuel & abstrait.
L'interface  L'INSU /
L'AGIR
CORPOREL

 est une partie de l'esprit que la pensée n'exploite pas. (D'après J. Abeille, Les barbares, 269)

 « L'insu est une ressource essentielle de notre déploiement.
 L'insu est ce qui pense en nous sans passer par

  • le raisonnement,
  • la formulation
  • ou la volonté.

L'insu nous permet d'accéder

  • à une réflexion
  • & à une action

qui donnent droit

  • à l'intuition,
  • à la découverte fortuite,
  • aux rapprochements incongrus,
  • au contrôle sans conscience, que permet une longue expérience. » Élisa Brune & Paul Qwest, Nos vies comme événement, Odile Jacob, 2019, 41

C'est en donnant accès à l'intuition que l'interface délivre le sauf-conduit vers le 3e genre de connaissance, tel que l'a peaufiné Spinoza dans l'Éthique, après l'avoir déjà abordé dans le Traité de la réforme de l'entendement (retitré par B. Pautrat en Traité de l'amendement de l'intellect dans sa propre version française), sous une forme moins élaborée.

 3e genre  La science intuitive

 Elle saisit intuitivement, de façon intellectuelle et immédiate, le rapport

  • entre un attribut infini de la nature
  • et l’essence de la chose qui est un mode singulier de cet attribut.

 La connaissance du 3e genre appréhende, comprend de façon immédiate, le lien entre les réalités
singulières et les aspects spécifiques de la nature infinie qui les fonde (choses ou idées).
 C’est vers ce genre de connaissances que toute l’Éthique conduit son lecteur.
 Le contenu, la signification  ne peuvent être saisis qu’avec la vérité.
 La science intuitive appréhende concrètement (et non plus abstraitement comme dans le 2e genre).
 LE RAPPORT / LE LIEN. in R. Misrahi, L'être et la joie, 114.

 

Pour Spinoza,

  1. Par ouï-dire: connaissance empirique sans fondement; les fake news (infox);
  2. Rationnel et démonstratif (comme les maths); le savoir ici est certes fondé, nécessaire & universel mais uniquement conceptuel & abstrait; le savoir précède l'acte;
  3. Le contenu, la signification ne peuvent être saisis qu’avec la vérité / la connaissance du 3e genre est la science intuitive: elle appréhende concrètement (et non plus abstraitement comme dans le 2egenre) R. Misrahi, L'être & la joie, 114 L'intuition inspire l'acte, l'éclaire, l'affine.

LE RAPPORT / LE LIEN, dit RM dans les 100 MOTS DU SPINOZISME, s'opère entre

  1. la totalité comme substance &
  2. la singularité de tout être.

Science intuitive
Cette science intuitive (3e genre) consiste à saisir l’immanence de la manière dont les réalités singulières s’insèrent dans la nature infinie.
Cette science intuitive implique de se libérer par rapport à tous les mythes de transcendance & de libre arbitre.
La science intuitive libère l’esprit à la fois de l’imagination et de la servitude.


Écarter les fake news, les infox
Il s’agit dès lors de se libérer le plus définitivement possible de la connaissance de 1er genre, la connaissance par ouï-dire (les fake news !), la connaissance empirique, car elle produit l’imagination illusoire et la fausseté des idées tronquées.

Seule la connaissance de 2e genre, la connaissance rationnelle, peut déboucher sur et engendrer un système d’idées adéquates relatives aux structures de l’être, c’est-à-dire la nature. C’est seulement à partir de cette connaissance rationnelle, à partir de l’unité de la nature que peut émerger la saisie intuitive du lien entre

  • les choses singulières &
  • la nature infinie.

Dans l'Éthique, la béatitude et la liberté en découlent, d’où naît le sentiment d’éternité, notion qui nécessiterait de longs développements pour éviter les malentendus.


L'intuition que la nature est une
Plus l'humain devient capable

  • de saisir du lien,
  • de se saisir du réel

par la science intuitive,

plus l'humain acquiert de l’intérieur, fût-ce de façon encore insue, l'intuition de l’unité de la nature: la nature est une & l'humain en fait partie,

& plus nous accédons à une joie pleine & entière.


Se convaincre que le monde est un.

Accéder à la plus haute joie possible.


Renvois
Car mieux on a conscience de soi-même, , plus on est, toujours selon l'Éthique,  "parfait" et heureux.
À la fin de l'article consacré à la connaissance dans les 100 mots de l'Éthique, Robert Misrahi fait apparaitre ces quelques mots-clés, qui sont autant de renvois vers d'autres termes de son lexique explicatif:

  • amour,
  • conscience,
  • éternité,
  • idée,
  • raison,
  • satisfaction de soi,
  • vérité.

Il s’écrit ainsi un balisage essentiel du spinozisme grâce à ce philosophe contemporain qu'est R. Misrahi.


Droit de suite
Cet essai est en cours de malaxage en vue d'agréger toujours plus finement l'insu aux trois genres de connaissances spinoziens dans un tableau synthétique. Il existe un droit de suite... dont une réorchestration d'un précédent essai ouvre ces perspectives-ci:


Nudité/Zones insues

Le toucher des Mains

  • assemble en cours de massage une multitude de sensations,
  • promeut à la longue une plus fine conscience intuitive de soi
    • par le contact &pidermique
    • & par l'appui que les mains impriment à travers l'enveloppe corporelle sur les organes accessibles à leur toucher,
  • multiplie les rapports d'intimité avec la vie en soi,
    • les sortant d'une large zone insue en soi que ce toucher différencie par affleurements constitutifs d'une conscience fragile qui en émerge davantage conscience d'elle-même.

Les Mains de l'accès

Les Mains, par le toucher qu'elles assurent & investissent, deviendraient, dans cette hypothèse, un canal (ou plusieurs) de communication privilégié avec une conscience avivée de soi au profit d'une appropriation intuitive, d'abord insue, puis émergente, finissant par se conceptualiser quand le processus semble arrivé à maturité. C'est ainsi peut-être que les Mains extérieures feraient accéder au mystère vital qui bat en soi. Peut-être. L'hypothèse est qu'elle redistribuerait l'énergie dans toute la structure corporelle.


L'éveil, progression

L'éveil progresserait alors en intégrant davantage les différentes parties du corps les unes aux autres. Il en résulterait une dynamique de plus en plus complexe d'un corps fluide, interagissant avec l'énergie universelle de façon plus appropriée, peut-être de manière spongieuse en s'en imprégnant de façon discrète & largement insue, c'est-à-dire non conceptualisable par avance.

Les observations multiples, accumulées sur un temps long, une décennie, semblent promises à attribuer aux Mains le rôle d'entremetteuses

  • d'une part entre les strates nombreuses dont tout corps se compose,
  • &, d'autre part, l'univers qui
    • l'enceint,
    • l'englobe,
    • le contient tout entier
  • dans toute sa complexité
    • infiniment indéfinie,
    • indéfinissable en son entier,
    • même si, çà & là, des approches définitoires pourraient, à force, s'esquisser. Une ébauche, tout au plus. & encore.

Spirale découvrant l'immense

Tout corps vivant communiquerait avec l'immense. En se le représentant sous la forme d'une spirale ouverte plutôt qu'en bulle sphérique étanche permettrait peut-être de visualiser plus aisément comment l'ouverture s'opère. C'est en ouvrant, spire par spire, l'accès par le corps à l'immense, tout en maintenant une homéostasie entre les deux, qu'une appropriation approfondie du corps pourrait s'installer progressivement. Ou pas.

 Les Mains procèdent-elles au déroulé progressif de la spirale ouverte organisant les profondeurs incluses en chaque soi, spire par spire ? Ce qui aurait pour conséquence qu'une appropriation approfondie de soi pourrait s'installer ? Impossible à affirmer. En émettre l'hypothèse parait déjà relever de l'indicible !


L'insaisissable insu
La vie sise dans tout corps alimente sa matrice personnelle au moyen de liens, de ponts, établis avec

  • la nature, 
  • l'immense,
  • l'univers;

ces liens sont situés dans son insaisissable insu, comme s'ils étaient sous-jacents. Ils se sont établis à mesure que le temps s'écoule. Ils n'en sont que plus essentiels justement parce qu'insus & insaisissables.

L' U   N   I
  N   A   M
  I   T   M
  V   U   E
  E   R   N
  R   E   S
  S       E

C'est

  • au maintien,
  • mais aussi à l'entretien

de la souplesse qu'assure l'alimentation du corps à travers ces liens, ces ponts avec

  • de l'impalpable,
  • du subtil,
  • de l'évanescent

que la progression vers l'âge vieilli de soi est peut-être la plus susceptible de se dérouler sans trop de heurts, sans être forcément un long fleuve tranquille non plus.

L'   I   S   É
    M   U   V
    P   B   A
    A   T   N
    L   I   E
    P   L   S
    A       C
    B       E
    L       N
    E       T


Couper trop de ces liens unissant, dans l'insaisissable insu, la matrice corporelle vitale de tout corps à l'immense

  1. abrègerait peut-être même bien la durée de la vie en soi,
  2. ou bien, à tout le moins, déstructurerait l'ancrage ferme de tout corps à sa juste place dans la nature en le rendant par là même si fragile.

Il se pourrait qu'en

  • prenant soin de conserver un maximum de liens existants entre le corps propre & l'immense,
  • voire même, pourquoi pas, en en établissant de neufs

le corps s'assurerait d'une vie

  • à l'écart de problèmes majeurs de santé,
  • ou, à tout le moins, en retarderaient la survenue.

Mudra


Ce n'est évidemment pas l'endroit pour entamer un exposé sur les mudras. Je souhaite juste attirer l'attention sur la place importante qu'occupent les mains en yoga & en médecine traditionnelle ayurvédique.

Le vécu personnel est plus singulier & nettement moins formalisé. Feuilletant à nouveau le premier ouvrage avant de scanner sa couverture, je suis frappé par un petit nombre de positions que mes propres mains prennent à l'occasion, de façon naturelle, sans que la position soit prise de façon consciente ni en leur attribuant le moins du monde une quelconque valeur. Bien sûr, cet ouvrage a été bien lu. Cela suffit-il au corps pour en avoir intégré l'une ou l'autre position sans que cela soit dû au hasard ?

Dans les traditions que ces ouvrages (et bien d'autres !) exposent, les mains sont porteuses de sens, voire plus si affinités, comme par exemple faciliter l'accès à l'énergie universelle. Dans le massage, elles peuvent s'entremettre pour en accentuer le signal à même le corps, si, & seulement si, la personne qui masse est douée et si, & seulement si, le corps se révèle y être réceptif. Ce dernier pourrait alors développer ses propres "capteurs" en vue d'affiner sa capacité à percevoir cette énergie, aussi sans intermédiation des Mains. À terme, ce processus pourrait même offrir au corps un accès de plus en plus autonome à un éveil en soi.


Accroissement autonome

Dans le courant du premier trimestre 2020, quatre milliards de corps ont subi un confinement moyenâgeux. En Belgique il a tenu deux mois les Mains éloignées. Ce temps de retrait en un havre promu béguinage pour quelque temps a été mis à profit pour explorer l'autonomie acquise par le corps. L'équipage tient apparemment la route et il a poursuivi son cheminement...

Je suis heureux d'avoir pu mener à bien ce droit de suite sur la voie de l'insu en réorchestrant un essai datant de janvier 2019 intitulé: Définir la part d'essence incorporée. Il faisait le bilan à l'époque. Cet essai-ci se conclut en mai 2020, dix-sept mois après.