Une larme inconnue
s’immisce,
une larme inconnue
s’insinue,
une larme apatride
dévale sur le visage,
elle se verse
en rappel de présence,
comme un hommage à
la proximité des deux têtes.
Hantée par la pesanteur,
elle tend à s’écouler
sur l’homme allongé.
Elle implore presque
un droit de passage
qui émeut l’origine.
La source n’est pas tarie.
Un sillon façonné
par les ans
amenuise la rencontre
avec la pilosité d’un jour
qui parcourt la joue.
Éperdue d’une douleur
incomprise
ou d’une joie
sans éclat encore,
elle alimente
sans le savoir
une source de trop peu.
La langue cueille
d’un tortillement
le sel de l’ailleurs
pour le faire sien,
s’y accoutumer
en quelque sorte.
Le bassin langoureux
continue à dresser
l’ébène-fait-corps
avec une souplesse
raide qui s’accoutume
au plaisir,
mains sous les aisselles
d’homme.
La larme attentive
perce la retenue
des amants.
D’autres sucs,
d’autres sangs
strient dans l’émoi
de la chaleur une
leurs pulsations
avivées.
La larme anime
de son sel
les papilles du visiteur
et récite la mélopée tue
par la voix encore contenue.
Et soudain
le souffle se fait cri,
petit, plus ample
quand la joie surgit
d’être au creux de soi.
Tout au creux.
Le dessin est extrait de Leven en werk van M. C. Escher, Meulenhoff, 1981, p. 316.