Une linguistique alternative [de l'anglais]
De la subjugation admirative s'est attachée en moi de plus en plus fermement, à mesure que je progressais dans ma lecture, vis-à-vis de la puissance d'une écriture habilement centrée sur la clarté éblouissante des contenus qu'elle met en scène de manière tellement efficace.
La table des matières enrichie des sous-titres internes à chaque section se charpente de la sorte: j'ai en plus, ma lecture presque achevée, choisi d'y inclure toutes les Thèses posées par l'auteur; les thèses deviennent aussi Principes sans que j'aie compris le pourquoi de cette variation
2023 (avril) | JJL, postface Monique De Mattia-Vivès | Système et style: une linguistique alternative |
Introduction 11 | Thèse 1: Au coeur du fonctionnment du langage, il y a la dialectique du système et du style 14 Thèse 2: La linguistique du système est nécessaire... 15 (voir ch3 p. 73) Thèse 3: ... mais elle n'est pas suffisante 16 Thèse 4: Pas d'exclusion d'une partie des phénomènes 17 Thèse 5: Il n'y a pas de linguistique sans philosophie du langage 19 Thèse 6: L'objet de la linguistique alternative est la description d'une langue, l'anglais 20 |
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Sections | 1. Anthropologie 23 | |
2. Philosophie du langage 47 |
Principe n°1: le principe d'immanence 58 Thèse principale: le langage est une forme de praxis 63 |
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3. Linguistique 71 | ||
4. Séances de travaux pratiques 93 | ||
5. Pragmatique 115 | ||
En guise de conclusion: stylistique 149 |
Thèse 1: Le style est l'inscription de la dialectique de l'interpellation et de la contre-interpellation |
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Postface: Le langage, le même et l'autre: effets théoriques de l'interpellation 175 |
Introduction / |
Me reste à concevoir une manière qui ne dépareille pas de vous en rendre compte ! Ce n'est pas gagné d'avance... sauf si l'idée, l'intuition, qui m'est venue à l'éveil du 4 1 25 est la bonne: j'ai en effet décidé d'inclure toutes les thèses en regard de chaque chapitre... pour me rendre compte qu'il n'y en avait pas dans chaque chapitre et que dans le deuxièmechapitre elles étaient accompagnées de principes et de thèses “positives”.
Et, en plus, dès la fin de l'introduction, en fait, il devenait clair qu'il manquait quelque chose au titre de l'ouvrage que je réécrirais volontiers ainsi afin de mieux encore rendre compte du contenu: Système et style: une linguistique alternative de l'anglais.
Les avoir assemblées toute ainsi au même endroit est interpellant. En effet, à priori cela ne rend nullement compte de mon enthousiasme de lecteur progressant dans l'ouvrage. Sont prturbants: la non-hiérarchisation des thèses d'un chapitre à l'autre, les numérotations itératives; les chapitres sans thèses ni principes... Bref, j'en espérais la clarté et je découvre des tas d'absconcités... Je laisse reposer.
La principale gêne qui m'est venue semble tenir à ce que tout cet effort de nature extrêmement théorique ne débouche en fait que sur une seule langue, la langue anglaise et non sur une théorie qui serait plus universellement applicable.
En concluant l'ouvrage, entre la thèse 7 et la thèse 8 p. 158, JJL fait référence au §23 de Recherches philosophiques de Ludwig Wittgenstein; je vous en livre le texte dans la traduction française à partir du texte allemand:
« Mais combien existe-t-il de catégories de phrases ? L'assertion, l'interrogation et l'ordre peut-être ? - Il y en a d'innombrables. Il y a d'innombrables catégories d'emplois différents de ce que nous nommons signes, mots, phrases. Et cette diversité n'a rien de fixe, rien de donné, une fois pour toutes. Au contraire, de nouveaux types de langage, de nouveaux jeux de langage pourrions-nous dire, voient le jour, tandis que d'autres vieillissent et tombent dans l'oubli. L'expression jeu de langage doit faire ici ressortir que parler un langage fait partie d'une activité ou d'une forme de vie. Représente-toi la diversité des jeux de langage à partir des exemples suivants et [à partir] d'autres encore: [j'en dénombre 18]
- produire un objet d'après une description,
- [produire un objet d'après] un desin -
- rapporter un évènement -
- faire des conjectures au sujet d'un évènement -
- établir une hypothèse et l'examiner -
- représenter par des tableaux et des diagrammes les résultats d'une expérience -
- inventer une listoire et la lire -
- faire du théâtre - [JM: écrire une pièce de théâtre et jouer un des rôles sont deux activités différentes]
- chanter des comptines -
- résoudre des énigmes -
- faire une plaisanterie; la raconter -
- résoudre un problème d'arithmétique appliquée -
- traduire d'une langue dans une autre -
- solliciter -
- remercier -
- jurer -
- saluer -
- prier.
Il est intéressant de comparer la diversité des outils de langage et de leurs modes d'emploi, la diversité des catégories de mots, de phrases à ce que les logiciens (y compris l'auteur du Tractatus logico-philosophicus) ont dit de la structure du langage. »
Le philosophe allemand ne distingue pas entre les langues; il établit des universaux. Je m'interroge vraiment sur le pourquoi de ce refus de la part de JJL qui, lui, circonscrit tout cet appareil linguistique à l'anglais. Je ne comprends pas en fait comment interpréter cette restriction.
Le texte figurant en quatrième de couverture, je serais curieux d'en connaître l'auteur·e...:
« De fait, une idée a toujours animé mes fouilles archéologiques : il faut prendre le langage par le biais de la dialectique du système et du style. »
Qu’est-ce que le langage ? Un système de signes fixé, par exemple, dans les traités de grammaire. Mais, ne l’oublions pas, son existence est aussi conditionnée par les manières toujours variées, souvent fautives, dont les sujets parlants se l’approprient : c’est la dialectique du système et du style. Jean-Jacques Lecercle la place au cœur de sa linguistique alternative, dont il livre ici un exposé aussi succinct que lumineux.
La langue, jamais totalement systématique, consiste en un ensemble de normes plus ou moins stabilisées, soumises aux changements que leur impose le « hors-norme » stylistique. Dès lors, elle n’est pas essentiellement un système idéal abstrait qui s’impose à nous de l’extérieur, mais une partie de la praxis, un phénomène à la fois historique, social, matériel et politique. Les signes et la grammaire sont d’abord des produits de l’activité humaine, faits et défaits en permanence par les locuteurs individuels. Si le sujet est effectivement « interpellé » par des règles qui lui préexistent, il a aussi la possibilité de « contre-interpeller » la langue et, ainsi, d’y introduire une dose irréductible de singularité et de variation.
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