Lorsqu’elle eut trente ans,
Prise entre devoirs et désirs
Contraires, il lui arriva souvent
De souhaiter être vieille
Libre des atermoiements du cœur
Et des soubresauts du corps
(Il faut bien qu’il exulte, oui
Mais à quel prix ?)
À cinquante ans révolus
Elle clama haut et clair
Jamais plus ! Rien à faire !
Fermé pour cause d’abandon
Passez votre chemin,
Laissez-moi dormir en paix !
C’était sa ferme résolution
Elle entra en hibernation.
Mais voilà qu’aujourd’hui,
À son grand âge parvenue
Tête chenue et mains tavelées
Elle découvre que rien n’est résolu
Elle ne veut pas mourir
Cette bête tapie dans l’ombre
Et qui quémande encore
Tendresses et caresses
Ah ! N’avoir plus de corps
Écrivais-tu en lettres majuscules
N’avoir plus de chamade au cœur !
Vaine illusion, souhait ridicule.
Quand seras-tu sereine,
Assise au coin du feu
Et ravaudant tes peines
Ma pauvre et folle vieille ?