La porte est ouverte.  
Ambiance feutrée. Décor sobre. Lumières tamisées.
Température fraiche. Des fleurs. En gerbes, en bouquets. Des fleurs qu’on apporte, qu’on dispose. L’odeur des fleurs. La boîte oblongue. La photo. Des dessins d’enfants…
Des gens qui sont là. Des gens qui attendent. Des gens qui entrent, des gens qui sortent. Des mains qui se serrent. Des joues humides qu’on embrasse. Des accolades. Chuchotements.
Reniflements. Froissements de mouchoirs.

-  Il est vite parti.  
-  On ne s’y attendait pas.
-  Je ne savais pas qu’il était malade.
-  Il a été bien entouré.
-  Il n’a pas souffert.
-  On peut dire qu’il a eu une belle vie.
-  Il est mieux là où il est…
-  Il a reçu beaucoup de fleurs. On ne sait plus où les mettre.
-  Ma sœur ne pourra pas venir. Elle ne va pas très bien non plus…
-  Non, non, ce sera une simple absoute.  
-  Il a demandé à être incinéré.
-  Il y a une erreur dans le journal. La levée du corps est à 10 heures. Ils ont écrit 9 h 30.  
-  Lui qui aimait tant les fleurs. Il ne pourra pas les voir…  
-  Chut ! Ne touche pas ! Ce n’est pas un endroit pour les enfants, mais je n’avais personne pour les garder…
-  C’est votre petite fille ? elle est bien sage.
-  On aura notre tour. Y a rien à faire. C’est la vie.
-  Ce sont de mauvais moments à passer.
-  Et toutes les démarches, les papiers…  
-  Vider la maison, ça sera dur. On ne sait pas encore ce qu’on va en faire. Non. C’est trop tôt.  
-  Vous prendrez bien une tasse de café ?

La porte est ouverte. Mobilier fonctionnel. Décor sobre. Néons froids. Des sièges alignés. Une table basse. Des tasses. Des verres. Thermos et perco. Cliquetis des cuillers. Odeur de café. Bruits de chaises remuées. Des gens assis. Des gens debout. Des gens qui s’asseyent. Des gens qui se lèvent. Des gens qu’on salue. Des gens qu’on ne connaît pas.

-  Vous prendrez bien un biscuit.  
-  Voilà votre café. Si vous voulez du lait ou du sucre…
-  Toujours noir pour moi.
-  J’ai apporté des photos.
-  Nous viendrons en voiture avec Marie.
-  Vous le connaissiez depuis longtemps ?
-  On a travaillé ensemble.
-  Nous sommes des voisins. On était devenus amis, depuis le temps…
-  Je dois y aller, maintenant.
-  On se verra sans doute demain. On vous a dit que la levée du corps était à 10 heures ?
-  Je dois vraiment y aller. Merci pour le café.
-  J’ai demandé un jour de congé sur mes vacances. Sinon, je n’avais pas droit.
-  Allez, je ne le dis plus.  
-  Bon courage !
-  Si vous avez besoin de quelque chose, n’hésitez pas.
-  A demain.

Ciel bleu. Soleil indifférent. Les graviers crissent. Les oiseaux chantent. Ce sera un bel enterrement.