Chaque humain passe en sa vie
comme une émotion
tendue sur un précipice,
tel un filet de protection.
Chaque jour, le verger délivre
sa ration de fruits
chus, pas déchus.
Le corps s'immisce sous les branches,
les genoux ploient sous lui,
le bras se tend,
la main se saisit
de chaque don
à même l'herbe.
L'énergie savoure ce passage
sensible & dense
que lui offre l'arbre des roues
dont les axes tournoient.
Est-ce elle qui fait grincer
l'acouphène en parsemant
l'espace sonore intime
de ces frôlements crissés ?
Le charme a profité des vents
puissants de l'automne:
offrandes branchues déposées
sur le sol dans les limites
de sa couronne.
Le soleil éclaire la page.
La main trace de noir
la scansion qui résonne.
Le menton se détend
en respirant sur le sternum.
Pépiements surplombent le corps
dans les frondaisons.
Le cou se tend à la demande
des yeux qui sondent le ciel bleu.
D'énormes cotonnades grises
peuplent l'horizon au Nord.
L'éclaircie dans l'espace visuel
écarte la couverture nuageuse.
Le corps jouit des caresses
tactiles, artistiques,
mêlant chaleur et fraicheur.
Les mains se réfugient
sur la tasse chaude
dont le contenu désaltère
le corps, à sa demande.
Le café circule.
L'esprit sait la soupe de légumes
mûris à trois cents mètres
du havre dans un verger bio.
Elle pourrait parsemer ses bienfaits
dès que l'ombre aura remplacé
la couleur chamois de la page.
La ceinture abdominale
se gonfle puis se contracte.
Une pie anime l'espace sonore
d'un chant récurrent
destiné à ses congénères.
Ces partages sculptent
le sensible universel.
Le frais,
proche de l'entre-chien-&-loup,
monte
par les jambes du pantalon:
perte de confort.
Les pieds se posent sur le sol,
le corps se verticalise,
une main ferme le carnet,
emmène la tasse vide,
le livre et le crayon.
Merci pour ce vécu habité.