Jacques Abeille: Une poésie habitée
« L'expression de [la lune] est l'apanage de ceux que, faute de mieux et momentanément, on nommerait des poètes, à cette réserve près que le chant et la danse sont des arts réservés aux femmes [chez les peuples du désert], tandis qu'aux hommes revient la musique instrumentale, soit l'usage du tambour et de la flûte. Il en résulte que l'oeuvre des poètes est d'une prose rythmée, se prêtant éventuellement à se laisser psalmodier en contrepoint de certaines improvisations instrumentales, plutôt que des poèmes, si l'on entend par ce terme un genre déterminé et défini par des règles de rhétorique plus ou moins explicites. ...
Quant à la littérature première — ou poétique — elle n'est, dans le premier moment où elle s'élance portée par la voix de l'inspiré, à proprement parler, ni vraie ni fausse. Elle consiste en récits qui, pour ce qu'on peut savoir en l'état des connaissances, présentent sous une forme imagée ou romanesque, les vaines aspirations humaines vers la lumière ou vers la plénitude. » J. Abeille, in Les carnets de l'explorateur perdu, Bonda la lune 81-82