Je vous écris d’un pays lointain. 
D’un bras de terre échoué dans la mer.
Presque

Je vous écris du bout d’un monde.
Du bord d’un autre.
Là où le chemin s’arrête.
Là où on ne peut aller plus loin seul.

Je vous écris d’une maison aux murs de chaux et aux volets bleus.
Le soir, la mer s’invite dans vos rêves, de son chant monocorde et envoûtant.
Le soir, les cris des vagues qui se fracassent sur les rochers déchirent le silence.
La nuit, le silence est vague.
La nuit, le silence s’envole en bourrasques tourbillonnantes.
Les volets claquent ; les planchers craquent ; les murs se lézardent.
Et la pluie tambourine aux fenêtres.
Elle insiste. Se déverse en trombes et réveille les éléments.
Le vent siffle, le tonnerre hurle, les éclairs flashent, les vagues écument…
Puis tout s’éloigne. 
Le vent caresse, le tonnerre ronronne, les éclairs se tamisent et les vagues, lasses,
s’échouent nonchalamment sur la pierre érodée.
La mer berce, inexorablement. 

Au petit matin, l’écho ramène le chant éraillé des mouettes, sur fond de moteur diesel
hoquetant.
Avant l’aube, les bateaux quittent le port, les poissons dansent encore, les filets sont
parés.
L’ozone dissipe ses effluves humides et tièdes.
Les quelques flaques sur les rochers sont les seules témoins de la nuit. A moins que
ce soit juste la marée qui ait omis de les emporter.

Au petit matin, la maison blanche aux volets bleus a retrouvé le reflet des rayons
débridés du soleil.
De l’autre côté du port, à l’entrée du Golfe, claquent les voiles rouges des Sinagots.

Je vous écris d’un bras de terre qui a voulu épouser la mer.
De leur relation tumultueuse témoignent les rochers déchiquetés.
De leur idylle amoureuse naissent ces étendues immenses à marée basse, où la
terre se repose et la mer, d’un cliquetis, l’arrose.

Je vous écris du bout du monde et, souvent, j’y reviendrai.


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