Il s’est éparpillé en moi
une tristesse remontée
du fond de mes âges.
Sans effort, l’accepter pour vraie,
par confiance en d’autres intuitions,
j’ai le « Connais-toi toi-même » illusoire…
comme inversé par un réel
filtré sans dessein.
Plus tard, l’observer, la triturer.
Elle est peu farouche, la tristesse,
même si je la retiens prisonnière.
Il s’établit une confiance mutuelle.
Elle prend un long temps
de solitude dominicale
pour donner tout ce qu’elle donne.
Un glissement ultérieur de l’œil
sur la bibliothèque philosophique
détache un livre au titre
révélateur de l’état d’être perdu:
« De l’autre côté du désespoir ».
Puis, sans mémoire
d’un instant précis,
elle se dissipe,
comme un brouillard
que le soleil effarouche.
Elle est sans avant,
sans après.
Un état dépourvu de tristesse s’est assemblé,
comme si elle s’était tarie de moi
et m’avait laissé aux bons soins
d’une sérénité intrinsèque et intacte.
Ce terreau favorable s’imprègne
de la pensée de Svâmi Prajnânpad.
Admiration silencieuse
des œuvres complètes de René Char.
Je suis un peu repassé
de l’autre côté du désespoir.
Je dois cette traversée au don
que des mains ont su faire.
Le présent, rien que lui.
Je reçois ce qui m’est donné.
Il est ici une rivière paisible.
***
Les deux ouvrages cités sont:
René Char, Œuvres complètes, Gallimard, collection La pléiade, 1983-1995, p.
André Comte-Sponville, De l’autre côté du désespoir: Introduction à la pensée de Svâmi Prajnânpad, Éditions Accarias L’originel, 1997, 119p.
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