bergeoir po&tique

28 06 21

Matin-nature frissonne.
l'humide y foisonne.
Sans façon, le végétal s'y adonne.
Une sagesse sans espérance,

celle qui convient à l'élégance
de ces temps subis.
Nos inconséquences collectives
régurgitent à qui mieux mieux.

Toutes ces épopées d'objets,
faire sans. Assouplir l'idée que
que le corps se faisait du confort
Ces prés,
baignés de champs aux courants invisibles

en réseaux, peuplent l'univers intérieur.
Ils débordent au-dehors.

De biens pleines bassines se dévident là.
Le corps s'enracine en ces lacis


pour y puiser sa substance.
Hygromètres affolés,
toutes alertes rouges clignant des yeux;

l'omniprésence de l'eau donne à ces roses

un teint qui sied à de fraiches demoiselles,
toutes cintrées sur leur boutonnage ferme.
Juste consentir. Un lent apprend-tissage de soi,
l'inédit d'exercices corporels au vouloir manifeste.

Autant de mises inédites en puissance
du corps s'ouvrant aux senteurs
qui montent de la terre en paisibles bouffées,
comme si l'effusion tendre

dissolvait quelque peu les membranes
maintenant assemblés les organes
dont chaque être vivant est fort composé.
Comme si comptait plus que tout

de gorger chacun d'eux
avec ces bienfaits qui sourdent,
impalpables & féconds,
de la blondeur soudaine de l'air.

Le plaisir qu'accomplit
cette villégiature intérieure
y promeut une joie paisible & ferme.
Une trouée entre deux travées de nuages

projette un instant
l'ombre de la main
qui écrit sur la page.
L'éveil à l'autour de soi

y dépose une intimité profonde,
comme si la proximité en
cette longue immersion
abaissait un peu le seuil

des timidités spécifiques.
La peau pompe toute pointe
de chaleur solaire.
L'illimité avide

gorge chaque pore d'un amas seyant
de thermie déployée.
L'estival corporel se malaxe
au creux du couvert végétal.


27 06 21

Ce son, à force, deviendra familier.
Il sonne comme la continuité
d'un crépitement sans fin.

Cataracte régulière entonne
tout à coup quelques
vrombissements graves.

Il s'étire de plus en plus nettement
à mesure qu'il s'intensifie, le rideau
que tire la pluie transpire sur le paysage proche.

La façade d'est s'accoutume à l'ondée.
L'ouest était sa demeure jadis exclusive.
La pluie est devenue sans préférence.

Les vents vont comme ils sont poussés
par nos exigences décadentes.
L'influence délétère, entièrement notre fait.

La page assombrie:
quelques grammes d'uranium,
arrachés à la mine

par trop d'enfants-esclaves,
rayonnent. En sus,
quelques coups de pales,
façon greenwashing.


26 06 21

La mince pellicule
de sueur invite
le corps à s'en départir.

La douche d'éveil
énergise le corps dès
les premiers pas accomplis.

Être devenu
un tel lieu de passage
assemble un bonheur sans mesure,
aubes multipliées
qui font circuler
l'énergie à travers l'univers
intérieur: l'équilibre
s'y promeut sans effets,
sans efforts aussi.
Elle comble chaque recoin
d'un bien-être plein.
Il s'y épanouit. Nul besoin
de l'y conduire à bon port.
Il y est chez lui partout.
Il reconnait ses amarres
aux sensations qu'elles éveillent
en tendant un instant ses cordages.


25 06 21

Sourire élague. La conscience s'allège. Devenue légère, telle un fumet qui se répand pendant une cuisson réussie, imprégnant le moindre recoin, elle pénètre tout acte posé tant il s'éclaire. Il rayonne même.
Être devenu l'apprenti de sa propre ruelle, mi-ville, mi-campagne, ce rurbain diffus, compagne de vie en quelque sorte. Tant d'évènements se choisissent pour nous.
Être devenu une rive sans rivage
éloigne au mieux la dérive de l'âge.

Quand la ville pérégrine sous les pas,
elle enlivre le sac. Oh du peu,
mûrement élu
en un havre assidu.
La ville délivre tant d'impasses
au détour de trouées dans le tissu des façades.
Elles parcourent médianes, tranversales & tangentes.

Premières phrases
Christian Bobin, Autoportrait au radiateur: « Je les rencontre une fois par semaine dans une rue en pente. » Boite à livres de la bibliothèque publique locale.

Thich Nhat Hanh, Se détendre en pleine conscience: « Quand, dans la forêt, un animal est blessé, il se repose. » Emprunt.

Alain Damasio, Scarlett & Novak: « Novak court. »

Herman Van Breda, Sauver les phénomènes, ed. Allia: « Le 27 avril 1938, après une maladie de plus ou moins cinq mois, Edmund Husserl s'éteignit doucemet à Fribourg-en-Brisgau, à l'âge de 79 ans. »

Pierre Bergounioux, Russe, éd. Fario: « La philosophie de l'histoire a pour axiome que tout le passé est présent dans la réalité de l'histoire & la subjectivité des agents qui font l'histoire. »

Brigitte Fontaine, La vieille prodige, Le Tripode : « L'Ange Exterminateur nommé Corona copiffe la planète d'un métal de bronze apparent. »


23 06 21

Rue Monge

L'onde fraiche de l'air,
treize degrés dit la sonde.
Le corps vif, joues rosies,
signalent moins...
L'humide sans pluie
sature l'air d'une raideur propice
au centrage sur soi. Une joie d'intérieur
caracole en tête,
presque rien ne l'effarouche.
Quelques oiseaux font bombance
en terrasse. Le regard suit leur envol,
guillerets & insouciants;
Tant de vigilance pourtant.

L'oeil longe les matelas
alanguis d'herbes hautes.
Ils plongent entre chemins tracés
parmi ces ligneux dressés.
Tant d'eaux retenues
que leurs blondes verdeurs nullement
affalées là
rendent disponibles à qui sait y faire.
Le songe s'installe.
La pensée ronge
quelque densité.
Elle s'attarde, elle chemine,
elle prolonge des lignes de force
sur un au-delà invisible,
par delà haies & murs, émue,
sans s'alourdir autrement
d'y allonger le réel.

Rien n'évoque la rue Monge pourtant.


16 06 21

Chaque jour chemine, novateur si possible,
laissant quelques à priori résiduels
vadrouiller dans de bien plus obscures allées.


12 6 21

Mauss... ciel maussade.
Fraicheur matinale:
faut dire aussi ces GMT+2 font

se lever les travailleurs
de grand matin, avant l'aube.
&, pire, ceux qui travaillent en extérieur

doivent y subir les affronts
d'une fraicheur toujours si nocturne.
Quand l'indécision politique tranchera-t-elle ?

Déclinaisons: puissance d'agir,
dans le calme du matin;
persévérer dans son être.

Dès l'éveil,
progresser,
peaufiner
son parcours,

s'y accomplir tout en cheminant.
Y poursuivre une pulsion,
un effort, une tendance

vers une
certaine
forme de
perfection,
pleinement
inaboutie.


9 6 21

Le matin a intégré
les gestes sereins.
Papote familière:

Madame Poésie est en gare.
Le train, wagons panachés.
Capitale bariolée, à nous deux !

Un pays, deux régions l'ont élue.
Y circuler, joies printanières.
S'amenuisent les vêtures.

Estivales citadines,
métropolitaines alanguies
sur addictions smartphoniques.

Peaux claires,
chaussants hauts
sur shorts exigus.

Peu de voiles fondus dans la foule:
ils faufilent les corps
dans les interstices.

Des mammas africaines
bras chargés de courses
prêtes à nourrir la maisonnée.

La Grand Place exhale
avec volupté ce vide
de l'entre-soi salvateur.

Ville allégée des selfies
compulsifs de touristes,
M'as-tu-vu là, j'y étais !

Elle va
à l'amble
avec ses locaux.

Un livre, plume amicale,
découvert la veille
sur un giron visagier,

Passa Porta en dispose:
sixty-nine snapshots
on life as it goes.



Ceux-ci ont pris le temps de se composer
de multiples visages d'une plume assurée.
Des sensations sont posées là.

Leurs saveurs percolent.
Retrouvailles capitales:
Une visite si longtemps différée.

♦  ♠  ♣  ♥

8 6 21

L'entaille du temps
Chaque moment est
primesautier. En jouir
tient d'une disposition du soi
propice à la magnifier.

♦  ♠  ♣  ♥

4 6 21

Le quotidien d'un n'importe qui
s'observe de nulle part
& s'annote en petit parc
où se vit la punkitude d'un pré.
Il y chemine quelques lignes de fuite
que trace, parcimonieuse,
une tondeuse hacheuse,

appropriation d'un univers
d'écritures à la saison belle,
accueil fait au corps
nimbé par une clemence tempérée
en séjours prolongés sous un dais.

S'y imprégner de l'impassible souplesse

de tiges florales ployant
sous les caresses du vent.
Y accueillir d'abondantes
sensations sur la ployance
des corps végétaux,
maints fétuques balayant, élégantes,
l'air de leur aisance:
elle fascine, façonne aussi
cette vie coulant en soi
en lui étant favorable.
Elle l'invite même à corriger
l'assise quand le pas lâche prise.
♦  ♠  ♣  ♥

Cette saveur, déjà le gamin
s'en imprégnait alors que la mère
préparait le chou-fleur pour une cuisson:
elle lui paraissait une hérésie
tant y croquer à pleines dents
avait sa faveur. L'homme d'âge devenu
a écarté la contrariété mollissante.
Il s'épargne cette tristesse
qui en dissout la saveur.
♦  ♠  ♣  ♥

Un attablement carré
y multiplie les stations d'écriture ombrées.
La fresque murale
embrase le regard chaque fois
qu'il se détache de la page.
♦  ♠  ♣  ♥

Une lourde noirceur
de pluies contenues
efface la dernière brèche
par où l'astre galactique central
se faufilait. Le vent
éveille au corps une forme
de vigilance sereine
calculant déjà un possible repli
sur le bureau paternel.
La valeur précieuse
de papiers reliés est à ce prix.
♦  ♠  ♣  ♥

Cette patricienne tenue vespérale
dès dix-sept heures va à ravir
à la silhouette confortable qu'elle allonge.
♦  ♠  ♣  ♥

Coups de tonnerre. D'abord simple rumeur lointaine,
elle foudroie d'un son vif, taillé en biseau, l'air.
L'indiscutable noirceur
accourt par le Sud.
La couche d'Est éclaire encore le blanc de la page.
Le vent, sa caresse, se charge d'un humide intermittent.
La bombarde accompagne
cette multitude en mouvement.
La brise, comme poussée par une rugence souveraine,
détache du saule
de moindres accrochages qui choient en terrasse,
entretemps rejointe.
Les fleurs du pré semblent prêtes à s'en alarmer.
Dans les hauteurs, les bouleaux
balaient l'air de fins ramons en devenir.
Gouttes. Premières. Repli.
La moindre torpeur évaporée,
le corps aux aguets
écrit en s'appontant au fauteuil
à la rondeur embrassée.
La lumière appauvrie suffit à peine
à suivre la ligne. Pénombre acceptée,
elle préfigure, pensive, l'instant
où un LED proche pointera le nez.
♦  ♠  ♣  ♥

Pédiluve terrassé. Une mare y clapote
le temps d'une absorption.
Le toit dégorge; le ciel se lâche.
Même verticalité en déversoir qu'hier.
Elle ressemble à ces moussons filmées.
La cataracte soudaine
fait crépiter une cacophonie.
Bientôt l'accalmie.
Déjà la lumière
suit la résorption orageuse
& poursuit son cours.
Ces orages de chaleur
ont la quotidienneté
chevillée au corps.
La nature a tout le temps
de siroter, d'ici vingt-quatre heures,
l'eau en déversoirs.
Une paisible sérénité
monte de la terre humide.
Après la levée du rideau de pluie,
simple animation des branches,
comme une déglutition libératoire.

 

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