Nulle Part est un obscur lettré, libre, n'exerçant plus aucune charge rémunérée, pouvant encore servir, notamment au sein d'une asbl d'histoire locale dont il encode le fonds documentaire en un pur & bienveillant bénévolat auprès de la bibliothèque publique du lieu.
Le service de fonctionnaire public, Nulle Part l'a exercé par une carrière complète dans l'enseignement supérieur wallon, en Haute École - hors université donc, pour la terminologie régionale: English for special purposes, la communication et une incursion dans le domaine bien plus administratif de la gestion de la qualité.
D'un monde où la voie confucéenne ne règne pas, il a choisi de s'en tenir éloigné, il s'en désiste & se tient à distance de lieux potentiellement délétères et de temps perdus à lutter contre l'inéluctable mer qui monte (Quand la mer monte, film de la splendide Y. Moreau). Tapi en son lieu, en contact avec un monde choisi, il se consacre à un engagement de pure négation dont les gemmes (ou les scories !) rejaillissent notamment sur le site des éditions de nulle part.
Les deux voies d'écriture
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se consacre aux deux voies d'écriture qui le mettent en joie: le poème et l'essai, principalement de philosophie; à leurs interactions fécondes aussi: essais poétiques et poèmes philosophiques... Sur arrière-fond de formation initiale d'angliciste et de néerlandiste, avec forts penchants pour la linguistique et la communication, mais aussi un temps documentaliste au service de la culture scientifique de ses collègues & étudiants et un autre temps terminologue notionnel auprès d'une institution bruxelloise.
Du poème, il pratique volontiers le vers impair, souvent en strophes de trois vers - tercets -; de la philosophie, il laboure en conscience quelques chemins austères qui le nourrissent, s'attachant à promouvoir des valeurs comme la spontanéité, le non-agir relatif et le retour à l'origine, en tenant compte du fond indifférencié commun aux vivants terrestres, animaux & végétaux.
Il pratique volontiers la poésie « d'invitation faite à l'ermite » en chantant son milieu proche, sensible & réjouissant. Il y vit retiré en homme obscur, fidèle à son écritoire, ne cherchant pas à établir une quelconque notoriété à l'humain derrière l'utopie (u-topos, nulle part).
Le milieu proche protège sa (très!) relative pureté d'homme à travers une simplicité accessible et souvent réjouie.
Son retrait réside dans le coeur et pratique l'amitié choisie, sincère & forte qu'il prend plaisir à entretenir. Il se plaît aux rencontres que des contingences mutuellement électives mettent sur sa route. Toutefois, un commerçant revêche, peu scrupuleux, menteur ou une tâche vécue comme répétitive désormais et il s'en tient éloignés. Sans bruit. Sans esclandre ni énervement. À l'écart.
En son ermitage
En son minuscule ermitage - à l'échelle cosmologique - paysager au milieu d'une banlieue à l'environnement bien saccagé, affleure un jardin lettré auquel il se ressource avec bonté. Vivre proche du sol lui est devenu essentiel. Sa connivence avec le vivant trouve à s'y déployer.
Nulle oisiveté dans cette vie-là, mais un temps qui s'organise selon un équilibrage finement balancé entre échanges épistolaires, papotes amicales, lectures, relectures pour soi et pour des amis, contributions anonymes à leurs propres démarches citoyennes & artistiques, activités jardinières & culturelles, soins faits au corps - notamment grâce à l'antirégime au quotidien et grâce au shivaïsme taoïste non dualiste du Cachemire auprès d'un maître d'Orient (non religieux).
En son ermitage, il a rassemblé une bibliothèque personnelle d'origine parentale dont il nourrit les strates au gré des intérêts d'un homme de lettres. En retour, celle-ci l'étoffe & lui offre une présence culturelle pérenne. Avec ses auteurs-phare, tels Jacques Abeille, François Schuiten, Jacques Sternberg, Laurence Sterne car il s'agit de lire pour vivre, il en est persuadé.
De temps à autre, il pratique aussi la logique du don telle que P. Ricoeur l'a excellemment définie dans un entretien qu'il avait accordé en 1991 à la revue Alternatives non violentes et avait sobrement intitulé: Pour une éthique du compromis.
Il a repris à son compte en l'adaptant un usage cher au feng shui oriental authentique: l'autel photographique assurant présence aux ancêtres de sa courte lignée ouvrière ainsi qu'aux êtres chers qui ont marqué en son coeur son parcours d'homme fait.
Son retrait en cet entre-deux n'attire que peu l'attention - croit-il -, il se caractérise par « une pure propension à l'introversion spirituelle » mettant à profit une certaine lumière intérieure propre au corps énergétique de soi qui l'inspire comme en « un lieu à part & un temps à part ». Voilà. Tout n'est pas dit. Mais beaucoup déjà.


De nombreux termes et les quelques citations proviennent d'une conférence culturellement fort intéressante, présentée par LIU Nan le 12 mai 2017 au Séminaire de mésologie qui se tient deux fois par mois à l'EHESS (Paris). Cette conférence s'intitulait: L’érémitisme et la quête d’immortalité dans les milieux lettrés en Chine des Wei-Jin (IIIe-Ve siècle) : retournement du monde et émergence du paysage. Elle n'est pas encore disponible en ligne. L'assemblage créatif  en portrait chinois est de mon fait, évidemment.

Proximités: Être assidu à toute lumière. Portrait chinois en quasi-ermite de banlieue. Être un glaneur devenu. À la commissure des écarts.


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