11 10 24

L'humide atterri
sans atermoiements
fait éclore, discrète & finaude,
une champignonnière
à l'phémère durée
à même ce sol désaltéré,
atterré, gorgé d'une eau
propice à chacun.
Portée aux lèvres, la tasse –
gorge de café léger –
le corps aux aguets
d'un passage animalier.
En déceler toute trace,
une illusion que rien n'engage.
Juste y porter le regard
ici ou là, flou ou bien net,
suffit au plaisant.
Le moindre nuage
au matelassage
un peu assombri
dérobe la lumière:
la page en s'estompant
invite la main
à se tendre vers le led
si cela perdure.
Mais non ! la fenêtre
par où le crépuscule
retrouve son éclat d'or.
& c'est un yoyo lumineux
qui devient récurrence.

09 10 24

Il semble que m'assembler autour de mes lectures me ressemble.

Mona Chollet, Résister à la culpabilisation: suis-je légitime en tant qu'humain de sexe masculin à tirer profit de ce livre ? Assister à, autant qu'accompagner attentivement l'exposé très alimenté, très documenté des cinq chapitres permet d'appréhender au plus près certains acquis vécus par d'autres.

1. « Et tu ne sais pas que Ève, c’est toi ? » Être une femme, la faute impardonnable

2. Une injonction de non-vie De la diabolisation des enfants

3. « Cette phrase dans ta tête : “Tu l’abîmes.” » La maternité, passeport pour le doute permanent

4. Marche ou crève La productivité comme mesure de notre valeur

5. Nous sommes toutes des féministes en carton Le militantisme comme surveillance de soi et des autres

La lucidité face à soi, c'est auprès de ces Chercheurs d'ombres que Linda Lê a si bien assemblés en 2017 en 17 essais, dont 16 étaient inédits, resserrés en 170 pages chez son fidèle éditeur, Christian Bourgois. Je suis subjugué par la pertinence de cette écriture à couteaux tirés à l'encontre, envers le réel ou à l'avers de lui. Elle m'émeut autant qu'elle me remue par cet art du choix des vies réelles, fictionnelles, cinématographiques qu'elle évoque pour essayer un assemblage personnel dont elle tire une leçon de vie. Libre à nous, en notre for intérieur, d'en disposer à notre façon car UN trait majeur de cet ensemble est de ne jamais rien conclure. Elle y expose. À nous d'en disposer. Ou pas. Ou pas entièrement. À nous d'en frayer un passage qui se diversifie à chaque reprise en se faufilant entre les récifs qui jalonnent ces pages.

Emplir d'ampleurs venues d'ailleurs les terrains vagues de l'âme constitue un luxe qui se faufile sans malice dans les interstices, ces viduités que rien n'aménage.

« Nulle part au cours du récit Norman Mailer ne répond.à la question posée dans le titre [Pourquoi sommes-nous au Vietnam?]. » 16, in Les âmes hurlantes (d'une guerre et du cercle magique du mensonge).

« C'est à une exploration des confins que nous invitent Christina Campo et Maria Zambrano, toutes deux certaines que "philosophique est l'interrogation et poétique la trouvaille": entre révélation et occultation, entre clarté et obscurité, le chemin qu'emprunte l'homme, fils de ses rêves, ne mène peut-être nulle part, mais ce que Christina Campo appelle le "charme violent" de certains livres vien aussi de ce que nous, lecteurs, sommes face à des oeuvres comme des enfants égarés dans la forêt, chacun se demandant ce que l'autre sait de ses souffrances, chacun sachant ce qu'il lui faut atteindre, ce sommet où le texte devient présence absolue. » p.54 in Les soeurs de l'aurore.

« Chamboulé, égaré, toujours à deux doigts de s'évader, toujours prêt à se dresser contre les trafiqueurs, les faussaires, toujours de nulle part et impatient de s'en aller ailleurs, de prendre le large et de dyamité les forteresses de la raison, [Jacques Prevel] aurait pu dire de ses écrits: " Ceci n'est pas un livre ... C'est de l'absence qui jargonne, bafouille, éructe, vocifère, incendie." » p 72 in La vie par effraction.

« Le cinéma de Sharuna Bartas n'est pas un lieu fermé, il ouvre des portes, même sur le clandestin, le nulle part. Il invite à tenter une évasion vers un ailleurs éloigné de tout exotisme. » p. 155 in "J'aime tous les hommes qui plongent".

08 10 24

«... l'idéologie de droite qui dénonce la moindre demande

  • de respect,
  • de considération,
  • de traitement digne

comme le caprice d'une génération trop fragile sert assez bien un projet politique

  • d'asphyxie de la société,
  • de creusement décomplexé des inégalités,
  • de sape des services publics. » Mona Chollet, in Résister à la culpabilisation, ch4 Marche ou crève, § La révolution de Simone Biles, p. 212, éd. Zones, 2024.

Je trouve dans cet ouvrage moult bel avoine à verser dans mon auge...  L'autrice s'y exerce à faire montre d'une pertinence et d'une forme d'authenticité face au quant-à-soi antérieur qui est de fort intéressante facture.

07 10 24 Pessoatismes pessoatissimes

« Se publier - socialisation de soi-même. Quelle ignoble nécessité ! Mais même si c'est loin d'être un acte - l'éditeur gagne. Le typographe produit. Mérite de l'incohérence, au moins. » p 59, dans Livre(s) de l'inquiétude, N° 23 Esthétique du découragement, traductrice: Marie-Hélène Piwnik, Christian Bourgois, 2018

Ceci qui m'enjoint : « La solitude me désole: la compagnie m'oppresse. La présence d'une autre personne dévie mes pensées; je rêve sa présence en proie à une distraction particulière, que toute mon attention analytique ne parvient pas à définir. » p. 280, N°22 sans titre

« ... dans mon âme de Prince lointain, le frisson d'un présage est passé... » p. 57, N°22 Rêve triangulaire


Ces automnales déclimantes, un journal en quelque sorte, assembleront aussi certaines des phrases/paragraphes/etc. jetés en carnets à l'automne 2024. Les dates les plus récentes s'afficheront en haut de texte.

ven 27 09 24

Une récente excursion en librairie a permis de collecter quelques ouvrages qui tournent autour de Spinoza. Celui qui est en lecture pour l'instant s'intitule Spinoza, la décision de soi. Pierre Zaoui, son auteur, avait originellement publié l'ouvrage en 2008; l'ouvrage était épuisé; il reparait en édition de poche (Points/Essais n° 986), il l'a pourvue d'une nouvelle préface intitulée Comme par la main vers la béatitude ? pp 15-44) Les sous-titres sont les suivants:

  • Le maximum dans le minimum et inversément 25
  • Devenir naturel, authentique, anonyme, factice, tout à la fois 31
  • Persévérer le miracle: voir et fermer les yeux 37

Ces propos récents lui permettent d'actualiser le propos en y incluant d'autres parutions qu'il commente brièvement. Le reste de l'ouvrage est identique à la première édition.

52: « Comme si les déserts de solitude produits par notre monde actuel dépourvu d'horizon politique ou religieux lisibles venaient se peupler de Diogène embourgeoisés portant des lanternes magiques. » Joliment dit, non ?

60 « La grande sagesse stoïcienne se propose, comme dit Deleuze, d'être digne des évènements qui nous arrivent. ... & on retrouve maints accents de cette sagesse (stoïcienne) dans certaines incidentes de Spinoza, par exemple Eth. V, prop. X, scolie, mais en vérité nous verrons que Spinoza propose davantage qu'une dignité héroïque face aux évènements: UNE PLEINE DÉCISION DE SOI DAN SON CONTENU MÊME, c'est-à-dire EN ACTE. »

Structure du scolie selon P-Y Moreau, note 288, p. 602 de sa traduction de l'Éthique aux PUF:

  1. Efficacité de pouvoir enchainer les affects
  2. Règles de vie : exemples*
  3. Dans ces enchainements, il faut plutôt s'attacher aux vertus que dénigrer les vices.

* Sang froid & force d'âme permettent d'éviter les périls communs de la vie après les avoir recensés & imaginés. (réorchestration)


Par certains côtés, je suis un contemplatif: aucune lassitude à observer la nature visible par la fenêtre réagir aux circonstances météorologiques, apprécier le trait de lumière poreuse & vive que le soleil dépose un instant sur une mince ligne de la pelouse.

 

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